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vendredi 18 décembre 2015

Jean Giono - Que ma joie demeure (II)

Giono écologiste? Sans doute, encore que son écologie est plus proche d'un Henri David Thoreau que de celle des leaders actuels de l'écologie politique en France...

Mais, Giono humaniste, alors oui et encore plus ! En tout cas, il est certainement celui qui réconcilie le plus profondément, le plus intimement, Nature et Humanité dans une langue inimitable. Morceau choisi...





"L'homme, on a dit qu'il était fait de cellules et de sang. Mais en réalité, il est comme un feuillage. Non pas serré en bloc mais composé d'images éparses comme les feuilles dans les branches des arbres et à travers lesquelles il faut que le vent passe pour que ça chante. Comment voulez-vous que le monde s'en serve s'il est comme une pierre? Regardez une pierre qui tombe dans l'eau. Elle troue. L'eau n'est pas blessée et la voilà qui fait son travail d'usure et de roulis. Il faut qu'à la fin elle gagne et la voilà au bout de sa course qui aplatit à petits coups de vagues la boue docile de ses alluvions. Regardez une branche d'arbre qui tombe dans l'eau. Soutenue par ses feuillages, elle flotte, elle vogue, elle ne cesse jamais de regarder le soleil. A la fin de sa transformation, elle est le germe et des arbres et des buissons poussent de nouveau dans les sables. Je ne dis pas que la boue est morte. Je ne dis pas que la pierre est morte. La mort n'existe pas. Mais, quand on est une chose dure et imperméable, quand il faut être roulé et brisé pour entrer dans la transformation, le tour de la roue est plus long. Il faut des milliards d'années pour soulever le fond des mers avec des millimètres de boue, refaire des montagnes de granit. Il ne faut que cent ans pour construire un châtaignier en dehors de la châtaigne et, quiconque a senti un jour de printemps sur les plateaux sauvages l'odeur amoureuse des fleurs de châtaignes comprendra combien ça compte de fleurir souvent."  

Comment voulez-vous que le monde se serve de l'homme si il est comme une pierre? 
Il y a toute la relation de l'homme à la nature dans cette question. Non pas celle, instrumentale, qui a prévalu dans notre civilisation industrieuse, dans laquelle l'homme se sert du monde. Non plus celle, inquiète, de l'homme roulé en boule, serré contre lui-même comme pour se défendre, et qui finit par perdre car l'entropie joue contre lui et l'entropie gagne toujours. Mais celle, poétique, osmotique, cosmique, qui fait chanter l'homme ouvert et vivant, cet homme qui "fleurit souvent".  

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