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mercredi 9 décembre 2015

Lettre ouverte aux négociateurs de la Cop 21

Alors que vous en êtes à vos grossiers marchandages, «tant de degrés contre tant de millions », il nous semble honnête de vous dire la vérité : le problème est beaucoup plus grave que les 2 ou 3 degrés pour lesquels vous vous êtes réunis.

Car par miracle auriez-vous résolu le problème du réchauffement climatique qu'il vous restera celui de l'accès à l'eau, puis celui des ressources halieutiques, puis de la désertification et de l'appauvrissement des terres, puis de la sauvegarde de la biodiversité puis... puis....



Nous irons comme cela de conférences internationales en colloques d'experts pour au moins 100 ans. Certains d'entre vous (diplomates, scientifiques, politiques, ...) s'en réjouiront peut être qui pensent avoir tout à gagner à cette "aubaine" grâce à laquelle ils pourront louer leurs services pour de longues années encore. Mais l'humanité n'a pas cent ans, peut-être même pas la moitié, pour se remettre sur le bon chemin.
Notre voyage autour du monde nous permet de voir chaque jour l'étendue des destructions déjà opérées et de percevoir les dangers que les activités économiques font peser sur l'homme au nom de son "développement". Dans bien des endroits que nous avons visités, nous sommes au bord de la cassure; dans certains, malheureusement, la rupture est déjà là, et avec elle son cortège de malheurs et de désespérances.

Mais notre voyage nous  fait aussi rencontrer des communautés et des individus qui ont décidé de renverser le cours des choses et qui mettent en œuvre des solutions simples, ingénieuses, économes en ressources et dont l'impact climat est faible voire nul. Ils sont les lumières au bout du tunnel, celles qui devraient guider nos pas. Mais que peut un petit village, lorsqu'un homme cupide peut à lui seul dévaster l'écosystème de toute une région, lorsqu'une seule usine de traitement du manioc peut empoisonner la terre qui fait vivre des dizaines de milliers de personnes, lorsqu’une simple décision politique peut noyer une vallée ?

Ce n'est pas avec un thermomètre aussi précis soit-il, ni même avec une conférence aussi médiatisée soit-elle, que l'on pourra aider ces éclaireurs de l'humanité. Il nous faut prendre le problème à la racine. C'est le modèle même de développement, celui que les pays occidentaux ont initié il y a deux siècles et que tous les autres cherchent depuis  à imiter, qui est à changer. Toute notre erreur est de considérer que la richesse financière vaut preuve du développement. Nous croyons que cette richesse financière ne peut s'obtenir que par une économie "forte", compétitive et à cette fin nous concentrons ressources et main d’œuvre dans des villes surpeuplées dans le but avoué d'augmenter notre sacro-saint PIB  et un ou deux ratios à la mode chez les économistes. Ce faisant nous saccageons des écosystèmes entiers et nous détruisons des communautés multi-centenaires. Leurs habitants viennent augmenter la pauvreté qui s'entasse dans des villes devenues ingérables. C'est absurde et il est facile de le voir si on ouvre un peu les yeux.

C’est avec l’espoir que vous n’êtes pas définitivement aveuglés par cet or meurtrier que vous  convoitez tous, que nous nous adressons à vous.

Vous les dirigeants des pays "pauvres" cessez de poursuivre une chimère. Vous épuisez vos populations et vos ressources dans la vaine copie d'un modèle économique qui est déjà en train de mourir et dont on peut se demander parfois s’il ne cherche pas à vous entraîner dans sa chute. Chaque nation peut et doit créer son propre modèle. Faites confiance à vos peuples, ils vivent sur leurs terre, ils savent ce dont ils ont besoin et, mieux encore, ils savent comment l'obtenir. Ne pensez pas à leur place, aidez les simplement. Oubliez le PIB, le revenu par habitant et les classements « Doing business ». Mettez chacun de vos villages au centre de vos attentions, là-bas sont les vraies richesses. Là-bas sont vos 2 ou vos 3 degrés.

Quant à vous, dirigeants des pays "riches", cessez de vous mentir à vous-même et de tromper vos électeurs. Le monde n'est plus le même qu'il y a deux siècles lorsqu'un esprit entreprenant trouvait facilement l'argent, les ressources et la main d'œuvre pour démarrer un empire ou enrichir une région. Aujourd'hui l'argent est rare, les ressources épuisées et des décennies de luttes sociales limitent heureusement l'exploitation de l'homme par l'homme. Cessez de donner des leçons aux autres, allez plutôt apprendre chez ceux qui savent encore (faites vite, ils sont de moins en moins nombreux) comment on peut faire mieux avec moins. Vous disposez de cette "avance technologique" dont vous êtes si fiers? Utilisez-là à bon escient car toutes les ressources seront nécessaires pour nous sortir de l’ornière dans laquelle la cupidité, le gaspillage, et le manque d’imagination nous ont embourbé.

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