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jeudi 10 novembre 2016

Donald et alors?

Oui, je sais bien. Ça fait comme du sable dans la bouche. Un sable lourd, épais, encore humide avec un arrière-goût fort comme une stupéfaction et banal comme une répétition. Une espèce de retour de nausée qui nous donne envie de chanter des chansons gaies pour faire genre « même pas mal, même pas peur ». C’est un peu comme quand, enfant, on perd son chat, son chien ou son hamster : on est dévasté mais on sait qu’au fond ce n’est pas si grave, qu’on arrivera à oublier, qu’il y aura d’autres chats, d’autres chiens, d’autres hamster. On pleure en même temps que l’on se regarde pleurer et on  trouve un certain réconfort à cette étrange dualité…
 Au fond, c’est compliqué à expliquer l’effet que nous fait la victoire de Donald. On se dit que c’est incroyable, impossible, irréel mais, en notre for intérieur, on a toujours su que c’était possible, probable, presque certain en fait. Qu’on a été bien imprudents ou bien stupides de parier sur la sagesse des électeurs. Après tout, les mêmes nous avaient fait deux fois le coup avec Georges.

On se prend à débattre des conséquences potentiellement dévastatrices de cette victoire. Pour les mexicains, les homosexuels, les pauvres, les américains musulmans, les démocrates sans cravate, les républicains bon teint, les propriétaires dans les trump towers et les sans-abris de Chicago ou de Washington DC, les politiciens du marigot et les fonctionnaires des impôts qui auditent les comptes de Trump depuis plusieurs mois. Et cette pauvre Hillary, qui va devoir émigrer au Mexique, sans doute protégée par le mur qu’elle refusait de construire, pour échapper aux poursuites pénales que son opposant lui a promises ! Est-ce que Bill la suivra ?

On réalise alors soudain que la victoire de Donald, vient après celles de Vladimir en Russie et de Ercep en Turquie. Qu’il y a Victor en Hongrie qui n’est pas gratiné non plus, que Manuel en Espagne a encore sauvé sa peau malgré les casseroles, que Rodrigo sort les flingues pour dézinguer les trafiquants sans jugements aux philippines et que Teresa s’apprête à couper le cordon avec l’Europe pour se barricader elle et les siens derrières les hautes falaises de la perfide Albion. Et puis, plus proches de nous, il y a tous ceux qui attendent leur heure ou leur revanche, les Nicolas, Marine et compagnie dont le moins que l’on puisse dire est que la gentillesse et l’empathie les caractérise assez peu.

On regarde tout cela à la télé, on glapit des invectives ou on étale sa tristesse sur Facebook, on lit et on relit les articles du Monde, du New York Times, et des inrocks, et on conclut que le monde est foutu et que nos enfants sont dans la mouise.

Mais dans notre grand désespoir planétaire, dans ce marasme glaireux dans lequel nous nous enfonçons doucement, on oublie Pierre, le voisin qui dix fois nous a invité à prendre un verre chez lui et à qui nous n’avons jamais répondu ; on oublie Meriem qui vient d’avoir un bébé et qui aurait bien besoin d’un coup de main ; on oublie Driss qui rigole tout le temps avec les vieux au square et qui fait sourire même les plus aigris ; on oublie Manfred qui est venu s’installer en face il y a six mois avec sa femme et qui trouve que tout est « Wunderbar ! » ;  on oublie Jeanne qui fait des aquarelles dans la rue entourée d’une troupe d’enfants qui la regardent mélanger ses couleurs ; on oublie Rex, le chien du concierge qui nous fait la fête à chaque fois que nous rentrons ; on oublie le goût de la baguette de Samuel « le nouveau », le jeune artisan boulanger qui a remplacé Samuel « le vieux », parti à la retraite et bien heureux de laisser son fournil à quelqu’un qui « sait le pain ». On oublie jusqu'à l'existence de ces inconnus familiers. On oublie la vie quotidienne et on oublie le plaisir à être ensemble. On oublie que nous avons de bons livres pleins nos bibliothèques. On oublie les bonnes odeurs de cuisine, et les couleurs du ciel lorsqu’il décide de se la péter. On oublie que nos vies sont faites de milliards de liens et d’autant de sensations. Des liens que nous pouvons décider d’être fraternels ; des sensations que nous pouvons choisir d’être douces et agréables. Et que contre ça, ni Donald ni tous les autres n’y pourront jamais rien.


Alors sortez.

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